Conseil d'Etat, 24 octobre 2023, n°462511

Quelles sont les conséquences d’une majoration illégale du délai d’instruction sur la naissance d’un permis de construire tacite ?

Par un arrêt du 24 octobre 2023, le Conseil d’Etat a précisé les conséquences qui s’attachent à une majoration illégale du délai d’instruction d’une demande de permis de construire sur la naissance d’un permis tacite.

En l’espèce, M. B. avait déposé, le 29 décembre 2017, une demande de permis de construire en vue de régulariser la construction d'une serre agricole sur le territoire de la commune d'Aix-en-Provence. Par un courrier du 23 janvier 2018, le maire de la commune l'a informé de ce que le délai d'instruction de sa demande était majoré d'un mois et qu'en l'absence de réponse avant le 29 avril 2018, il bénéficierait d'une autorisation tacite. Mais, par un arrêté du 19 avril 2018, le maire a refusé d'accorder le permis sollicité. M. B. a alors demandé au tribunal administratif de Marseille d’annuler ce refus et d’enjoindre au maire de lui certifier, en application de l'article R*424-13 du code de l'urbanisme, qu'il est titulaire d'un permis de construire tacite. Toutefois, ce tribunal a rejeté sa requête et ce jugement a été confirmé par la cour administrative d'appel de Marseille.

Saisie à son tour, la haute assemblée affirme qu’il résulte des articles R423-4, R423-5, R423-18, R423-42, R423-43 et R424-1 du code de l'urbanisme

« qu'à l'expiration du délai d'instruction tel qu'il résulte de l'application des dispositions du chapitre III du titre II du livre IV du code de l'urbanisme relatives à l'instruction des déclarations préalables, des demandes de permis de construire, d'aménager ou de démolir, naît une décision de non-opposition à déclaration préalable ou un permis tacite. Une modification du délai d'instruction notifiée après l'expiration du délai d'un mois prévu à l'article R423-18 de ce code ou qui, bien que notifiée dans ce délai, ne serait pas motivée par l'une des hypothèses de majoration prévues aux articles R423-24 à R*423-33 du même code, n'a pas pour effet de modifier le délai d'instruction de droit commun à l'issue duquel naît un permis tacite ou une décision de non-opposition à déclaration préalable. S'il appartient à l'autorité compétente, le cas échéant, d'établir qu'elle a procédé à la consultation ou mis en œuvre la procédure ayant motivé la prolongation du délai d'instruction, le bien-fondé de cette prolongation est sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ».

Ainsi,

« la décision de refus de permis de construire ne trouve pas sa base légale dans la lettre du 23 janvier 2018 majorant le délai d'instruction de la demande de M. B., laquelle n'est pas une décision faisant grief susceptible de faire l'objet d'un recours pour excès de pouvoir, et n'est pas prise pour son application. Par suite, le moyen tiré de ce que la cour a commis une erreur de droit en écartant comme inopérant le moyen invoquant, par voie d'exception, l'illégalité de la lettre du 23 janvier 2018 informant M. B. de la majoration du délai d'instruction de sa demande doit être écarté ».

Par ailleurs,

« la cour n'a pas commis d'erreur de droit en jugeant que le bien-fondé de la prolongation du délai d'instruction était par lui-même sans incidence sur la légalité de la décision attaquée ».

Source: Fil DP