La loi n°2023-630 du 20 juillet 2023 visant à faciliter la mise en œuvre des objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols et à renforcer l’accompagnement des élus locaux dit "loi ZAN" tend à répondre aux interrogations et questionnements que la loi Climat et Résilience n°2021-1104 du 22 août 2021 a pu générer.
Pour mémoire, la loi Climat et Résilience a fixé un double objectif national :
- d’ici 2031, réduire de moitié au moins la consommation totale d’espace observée à l’échelle nationale par rapport à celle de la période 2011-2021,
- d’ici 2050, atteinte le ZAN, c’est-à-dire au moins autant de surfaces renaturées que de surfaces artificialisées.
La loi du 20 juillet 2023 apporte les ajustements essentiels suivants:
1 Nouvel échéancier pour intégrer les objectifs ZAN dans les documents d’urbanisme (article 1er modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104)
Les délais d’adaptation des documents d’urbanisme sont modifiés : les dates butoirs d’évolution des documents d’urbanisme, prévues par la loi Climat et Résilience pour la prise en compte de l’objectif ZAN ont été décalées de 9 mois pour les documents d’urbanisme régionaux (SRADDET, SAR, PADDUC, SDRIF), soit novembre 2024 et de 6 mois pour les SCoT et les PLU, soit février 2028.
2 Instauration d’une superficie minimale de consommation d’espaces NAF (article 4 modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104)
Afin de garantir le développement de chaque commune, une superficie minimale garantie de consommation d’espace naturels, agricoles et forestiers (ENAF) leur est garantie.
Chaque commune pourra, sur la période décennale 2021-2031 artificialiser un hectare, sans critère de densité, à condition d’être couverte par un document d’urbanisme prescrit, arrêté ou approuvé, avant le 22 août 2026.
Cette surface peut être mutualisée entre les communes membres d’une même intercommunalité dans le cadre d’un PLUi, à la demande du maire, après avis de la conférence des maires mentionnée à l’article L. 5211-11-3 du CGCT ou, à défaut du bureau de l’EPCI concerné si l’ensemble des communes membres en fait partie.
3 Adaptations liées aux grands projets d’envergure nationale et européénne d’intérêt général majeur (article 3 modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104 – article L. 141-8 6° du Code de l’urbanisme)
Les grands projets d’envergure nationale et européenne d’intérêt général majeur (lignes à grande vitesse, projets industriels d’intérêt majeur, prison, opérations d’aménagement au sein des OIN, réacteurs nucléaires..) ne seront pas décomptés des objectifs des collectivités territoriales, mais seront comptabilisés dans une enveloppe nationale dédiée.
Pour la première tranche de dix ans, ils s’inscriront dans le cadre d’un forfait national fixé à 12.500 ha dont 10.000 hectares seront mutualisés entre les régions couvertes par un SRADDET au prorata de leur enveloppe d’artificialisation définie pour la période 2021-2031.
La répartition sera précisée par arrêté du ministre chargé de l’urbanisme (à paraitre).
Cette enveloppe est séparée de celle des collectivités et n’est donc pas prise en compte au titre des objectifs fixés par les documents de planification régionale et les documents d’urbanisme locaux, même s’il y a un surcroit de consommation.
4 Mise en place d’une conférence régionale du ZAN (article 2 modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104 – article L. 1111-9-2 nouveau du CGCT)
Une nouvelle instance de concertation, réunissant élus locaux et régionaux compétent en matière d’urbanisme et de planification ainsi que des représentants de l’Etat est créée dans chaque Région, présidée par le président du conseil régional, elle sera notamment consultée dans le cadre des projets d’envergure régionale (sans les représentants de l’Etat), nationale ou européenne.
5 Instauration d’un nouveau droit de préemption urbain (DPU) (article 6 modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104 – article L. 211-1-1 nouveau du Code de l’urbanisme, article L. 300-1 du Code de l’urbanisme)
Les collectivités pourront, par délibération motivée, délimiter au sein du PLU des secteurs prioritaires à mobiliser qui présentent un potentiel foncier majeur pour favoriser l'atteinte des objectifs de lutte contre l'artificialisation des sols, à l’intérieur desquels sera institué un DPU.
6 Instauration d’un sursis à statuer sur les demandes d’autorisation d’urbanisme (article 6 modifiant l’article 194 de la loi n°2021-1104)
L’autorité compétente pour délivrer les autorisations d’urbanisme pourra surseoir à statuer sur toute demande d’autorisation entrainant une consommationn d’ENAF qui pourrait compromettre l’atteinte des objectifs fixés pour la période 2021-2031, compte tenu de l’ampleur de la consommmation ou de la faiblesse des capacités résiduelles de consommation.
La décision de surseoir à statuer est motivée en considération soit de l'ampleur de la consommation résultant du projet faisant l'objet de la demande d'autorisation, soit de la faiblesse des capacités résiduelles de consommation au regard des objectifs de réduction de consommation d’espace.
Le sursis ne pourra pas être opposé aux projets compensant la consommation d’ENAF par la renaturation d’une superficie équivalente.
Le sursis à statuer ne peut être ni prononcé, ni prolongé après l'approbation du document d'urbanisme modifié en application de la loi Climat et Résilience.
Les élus devront être vigilants en faisant application de ce sursis, car il ouvre au pétitionnaire un droit de délaissement pour que la collectiviré procède à l’acquisition du terrain objet du sursis à statuer.
7 Prise en compte des opérations de renaturation (article 7 modifiant l’article 194 III de la loi n°2021-1104)
La renaturation d’espaces urbanisés (transformation effective d’espaces urbanisés ou construits en espaces NAF) est désormais comptabilisée en déduction de la consommation des ENAF.